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de l’itinérance,

Pour sortir

les petits
gestes     comptent.
 

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«Si je n’avais pas eu ma meilleure amie, je ne serais plus là»

— Nicolas Leclair 

Gesture

De petits gestes peuvent parfois faire une grande différence dans le parcours d’une personne en situation d’itinérance. Alors que le nombre de sans-abri continue d’augmenter à Montréal et partout au Québec, trois personnes nous racontent comment des coups de pouce reçus dans des moments difficiles les ont aidées à se sortir de la rue.  

Notre rencontre avec Nicolas aurait très bien pu ne jamais avoir lieu.

Malmené par une enfance difficile rythmée par de nombreux déménagements et des conflits avec sa mère, le moral du jeune homme était déjà au plus bas quand il s’est fait montrer la porte de chez lui, en 2016.   

«Ma mère était pas mal dans l’alcool. De 16 à 18 ans, c’était vraiment difficile et, le jour de mes 18 ans, elle m’a demandé de faire mes affaires et de m’en aller. J’ai vécu des périodes dépressives pendant ce temps-là, des phases suicidaires aussi», confie le jeune homme.    

Un texte de Gabriel Ouimet

Photos/vidéo d'Étienne Brière et de Thierry Laforce

Jeudi 15 décembre 2022

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Une amie lui a ouvert sa porte 

Nicolas Leclair, 26 ans

«Pour moi, ça a tout changé. Si je n’avais pas eu ma meilleure amie, je ne serais plus là aujourd’hui. Elle m’a hébergé et écouté. Elle a fait les recherches avec moi et elle m’a donné de nombreux conseils», détaille-t-il. 

Font

«Pour moi, ça a tout changé. Si je n’avais pas eu ma meilleure amie, je ne serais plus là aujourd’hui. Elle m’a hébergé et écouté. Elle a fait les recherches avec moi et elle m’a donné de nombreux conseils», détaille-t-il. 

Ne sachant pas où aller, Nicolas s’est tourné vers une amie, dont la générosité lui a permis de ne pas sombrer. Dans les années qui ont suivi, quand les refuges affichaient complet, la porte de cette amie est restée ouverte.  

C’est en partie grâce à cette amie que Nicolas a pu trouver l’aide dont il avait besoin.  

Après avoir fréquenté de nombreuses ressources en itinérance jeunesse, c’est finalement aux Auberges du cœur, à Montréal, que sa sortie de la rue s’est concrétisée.  

Aujourd’hui en appartement et fier du chemin parcouru, Nicolas s’implique au sein de la Coalition jeunes+, un ralliement coordonné par l’organisme Dans la rue, dont l'objectif est la prévention de l'itinérance et le respect des droits des jeunes.

Il insiste sur l’importance qu’a eue son amie, qui lui a permis de refaire ses forces au moment où il en avait le plus besoin, mais aussi sur la détermination qui l'habitait pendant ces années difficiles. Parce que pour sortir de l’itinérance, «il faut se donner un coup de pied dans le derrière». Ce qui est plus facile à dire qu’à faire.

«Souvent, en itinérance, tu es en mode urgence. C’est un cycle qui se répète chaque jour: tu te lèves, tu manges, tu réponds à tes besoins de base. C’est difficile de voir plus loin que ça. Donc, c’est important de prendre le temps d’aider. Ça peut faire toute la différence.» 

Gesture

Saint-Eustache, Joliette, Repentigny, L'Épiphanie, Terrebonne: «trimbalée» d’une famille d’accueil à l’autre jusqu’à ses 18 ans, Geneviève a dû se débrouiller pour venir à Montréal le jour de sa majorité.   

Munie de sacs de poubelle en guise de valises, Geneviève a cependant connu des premiers temps difficiles à son arrivée dans la métropole.   

Un propriétaire lui a donné une chance

Geneviève Caron, 28 ans

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«Je me suis ramassée sans rien, sans domicile fixe, du jour au lendemain. J’ai demandé des sous à des amis et je suis venue en transport en commun à Montréal parce qu’on m’avait souvent dit qu’il y avait des ressources d’aide là-bas.»

Jusqu’au jour où, un mois plus tard, un inconnu l’a abordée pour lui indiquer où elle pouvait aller manger, dormir et trouver de l’aide.   

«C’est comme ça que ça a débouché. Ensuite, je suis allée à l’organisme Passages, une ressource de dépannage, où je me suis finalement qualifiée pour un séjour d’un mois», raconte-t-elle.   

Mais après ce mois de répit, elle a dû tout recommencer. «Cette fois-là, ça a été beaucoup plus long. Je suis resté six ans dans la rue», précise-t-elle.   

Aidée et encouragée par de multiples intervenants, Geneviève n’a jamais abandonné le rêve d’avoir un jour son appartement. Sa détermination a fini par payer.   

«Un propriétaire a accepté de me rencontrer même si je vivais dans la rue et même après lui avoir conté mon parcours. Il m’a dit qu’il n’y avait pas de problème à ce que je sois sur l’aide financière, tant que je le payais chaque mois. Il a même renoncé à l’enquête de crédit», raconte-t-elle.   

Ce propriétaire, M. Labrecque, a changé sa vie. À partir de ce moment, tout s’est enchaîné. Deux ans plus tard, Geneviève s’est trouvé un emploi. Elle a maintenant un conjoint et projette de mettre sur pied sa propre compagnie.   

«Je n’oublierai jamais les moments difficiles, mais je n’oublierai pas ceux qui m’ont aidée non plus. Je crois que c’est important de marteler que tout le monde peut s’en sortir. Je suis fière de mon parcours.»

Ce propriétaire, M. Labrecque, a changé sa vie. À partir de ce moment, tout s’est enchaîné. Deux ans plus tard, Geneviève s’est trouvé un emploi. Elle a maintenant un conjoint et projette de mettre sur pied sa propre compagnie.   

Ce propriétaire, M. Labrecque, a changé sa vie. À partir de ce moment, tout s’est enchaîné. Deux ans plus tard, Geneviève s’est trouvé un emploi. Elle a maintenant un conjoint et projette de mettre sur pied sa propre compagnie.   

«Je n’oublierai jamais les moments difficiles, mais je n’oublierai pas ceux qui m’ont aidée non plus. Je crois que c’est important de marteler que tout le monde peut s’en sortir. Je suis fière de mon parcours.»

Des toiles colorées égayent les murs blancs du modeste une pièce et demie. «Ce sont toutes mes œuvres», souligne-t-elle fièrement.   

Âgée de 58 ans, Michelle a plus de 33 déménagements à son actif. C’est la première fois qu’elle habite quatre ans au même endroit. Aux prises avec des problèmes de santé mentale qu’elle a tenté d’ignorer pendant des années par peur du jugement de ses proches, la mère de deux enfants s’est longtemps sentie «vaciller vers l’itinérance».   

Jusqu’au jour où la maladie lui a fait perdre pied. 

Une travailleuse sociale a enfreint
les règles pour l’aider
 

Michelle Laporte, 58 ans

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«Bienvenue chez moi. C’est mon havre de paix, ici», indique Michelle, en nous faisant entrer dans son logement du boulevard Saint-Michel, à Montréal.  

«À ce moment, tout allait bien. Je travaillais chez La Baie, j’habillais les mannequins. Puis, un jour, je voyais les mannequins avec des cravates, mais comme s’ils se pendaient. C’est là que tout a basculé», souffle-t-elle.   

La psychose a poussé Michelle à quitter son logement d’Outremont. Elle s’est alors mise à dormir sur des bancs de parc.   

Après une dizaine d’années à fréquenter les refuges, elle a rencontré Isabelle, son premier «pilier», la seule travailleuse sociale à avoir accepté de ne pas respecter certaines procédures et de lui fournir une liste de logements à louer.   

Sans téléphone cellulaire, Michelle n’avait que 15 minutes par jour pour téléphoner, de quoi compliquer ses recherches.   

«C’est une autre itinérante qui m’a fait réaliser que je devais avoir un téléphone. Elle m’a aussi expliqué des choses qui m’ont permis d’avoir une vue d’ensemble sur ma situation. À partir de là, je me suis procuré un cellulaire et ça a commencé à aller plus vite», mentionne-t-elle.    

Soutenue par des intervenantes qui, dit-elle, n’ont jamais cessé de croire en elle, Michelle a essuyé une vingtaine de refus sur plusieurs années avant de recevoir l’appel lui annonçant qu’un logement s’était libéré pour elle aux Habitations de l’Ancre.  

«La première nuit, j’ai dormi avec mon trousseau de clés, par terre, avec mon sac à dos comme oreiller. Comme quand j’allais coucher dans la rue. Je n’y ai pas cru pendant des mois, pendant une année, même», indique-t-elle.   

Aujourd’hui, Michelle souhaite écrire un livre. Elle peint. Elle joue du piano. Elle est fière. Et elle a un message pour nous tous. 

«Il faut absolument travailler à déstigmatiser l’itinérance. La société peut et doit s’ajuster. Les rassemblements, la chaleur humaine, les sourires empathiques et le besoin d’appartenance sont des choses primordiales», conclut-elle.   

Material property

Crédits

Rédaction: Gabriel Ouimet

Photos /vidéo de Nicolas et Geneviève: Étienne Brière
Photos de Michelle: Thierry Laforce

Design et expérience: Marilyne Houde

Motion design: Alexandre Pellet

Direction de création: Kevin Massé

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