habillage

Tsunami
gris


Les défis du vieillissement
au Japon

Soleil

Un « tsunami gris » déferle sur le Japon. Près d’un individu sur trois sur l’archipel est un aîné. L’Empire du Soleil-levant figure aujourd’hui parmi les États ayant la population la plus âgée la planète. Le Journal s’est rendu au Japon pour y constater les impacts de cette crise démographique et les défis qu’elle pose. Car le Québec vieillit rapidement et, d’ici moins de 10 ans, la province sera dans la même position.


Le démographe Rikiya Matsukura de l’Université du Japon ne dresse pas un portrait reluisant de son pays. Les bras lui tombent lorsqu’on lui demande ce que l’avenir réserve aux Japonais.

« Moins de services et plus de taxes » résume-t-il à contrecœur.

« Ça crée beaucoup de tensions », dit-il à propos du vieillissement de la population. Les aînés coûtent une fortune au gouvernement, et par la bande, aux contribuables. Les jeunes qui cotisent au régime de rentes japonais, craignent déjà que la bourse soit vide à leurs vieux jours.

« Les gens devront se fier sur leurs économies », souffle-t-il.

Les jeunes Japonais sont ainsi encouragés à travailler davantage, ce qui n’aide en rien le faible taux de naissance et la solitude, fait-il valoir.

C’est ce très faible taux de naissance, jumelé à une immigration quasi inexistante, qui explique la situation actuelle.

D’ailleurs, affirmant que le vieillissement de la population et les rares naissances menaçaient le fonctionnement même de la société nipponne, le premier ministre, Fumio Kishida, a promis cette semaine de s’y attaquer en doublant les programmes liés aux enfants.

Espérance de vie

L’espérance de vie des Japonais est aussi l’une des meilleures au monde. Si les hommes peuvent espérer vivre jusqu’à 81 ans, comme au Québec, les femmes ont une espérance de plus de 87 ans.

Le vieillissement est loin de passer inaperçu au Japon. Les aînés sont deux fois plus nombreux qu’au Québec à travailler. Impossible de marcher dans les rues sans croiser un « keibiin », ces agents de sécurité devant divers édifices ou pour la circulation, dont la grande majorité d’entre eux sont des hommes grisonnants ayant souvent plus de 70 ans.

Le métier de gardien de sécurité est fréquent chez les aînés au Japon.
Le métier de gardien de sécurité est fréquent chez les aînés au Japon. Photo Hugo Duchaine, Journal de Montréal

L’exemple peut paraître banal, mais le Japon regorge de toilettes publiques, dans le métro ou les parcs. Et il y a toujours un urinoir avec des barres d’appui pour les personnes à l’équilibre précaire.

« Ça va augmenter la fréquentation des espaces publics, ça rassure », souligne André Tourigny, médecin spécialiste en santé publique et co-directeur de l’Institut sur le vieillissement et la participation sociale des aînés.

« C’est la société qui doit s’adapter au vieillissement et pas la personne aînée qui doit s’adapter à la société. Des fois, on a l’impression que ce n’est pas toujours le cas », fait-il valoir.

S’il voit un mouvement d’entamé au Québec pour s’adapter au vieillissement, il souligne que la province vieillit très vite.

Comme le Japon, il croit que le Québec devra augmenter l’accessibilité aux transports et miser sur les nouvelles technologies, notamment.

Pas prêt

Mais le Québec est-il prêt pour son propre « tsunami gris » ?

« La réponse courte, c’est non, on n’est pas prêts », lance le gériatre Stéphane Lemire.

« Faut se déniaiser et arrêter de penser qu’on va frapper un mur dans 10 ans, poursuit-il. Le mur, on le voit à l’urgence, où des aînés hospitalisés dépérissent à attendre une place en CHSLD, on l’a vu pendant la pandémie quand 5000 aînés sont décédés. »

Le Dr Lemire milite pour la gériatrie sociale, soit un modèle de services communautaires près des aînés.

« Beaucoup d’organismes communautaires existent, mais il faut s’assurer que le financement soit là », dit-il.

Cette proximité avec les aînés, des villes japonaises la créent en jouant pratiquement le rôle d’un proche envers les citoyens âgés ayant besoin de services.

Et comme ici, le vieillissement a aussi des conséquences sur la pénurie de main-d’œuvre. Le Japon doit notamment s’ouvrir plus que jamais à l’immigration et développer rapidement des technologies pour combler le manque d’employés.

Des aînés d’Osaka se rassemblent pour jouer quelques heures dans un café. Des aînés d’Osaka se rassemblent pour jouer quelques heures dans un café.
Des aînés d’Osaka se rassemblent pour jouer quelques heures dans un café. Photo Hugo Duchaine, Journal de Montréal
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Des traditions en péril par manque de relève

Le déclin rapide de l'artisanat traditionnel inquiète les aînés japonais.


Des arts traditionnels, comme le tissage de la soie ou le théâtre kabuki, qui ont fait la renommée du Japon pendant des siècles souffrent d’un manque de relève à cause du vieillissement de la population.

« La population chute constamment […] Il y a de moins en moins de jeunes à qui transmettre la tradition du théâtre kabuki et ce sera difficile de maintenir nos festivals », constate à regret Takahiro Koenuma, un dirigeant municipal de la ville d’Ogano, à un peu plus de 100 km de Tokyo.

La petite ville d’environ 11 000 habitants, dans la région voisine de la grande capitale et métropole japonaise, est reconnue dans le pays pour son dévouement au théâtre kabuki traditionnel.

Cette forme de théâtre, inscrite au patrimoine de l’UNESCO, existe de plus de 400 ans. Les acteurs, fortement maquillés, sont aussi vêtus d’habits traditionnels et entourés de décors élaborés.

Des élèves d’Ogano au Japon mettent en scène une pièce de théâtre Des élèves d’Ogano au Japon mettent en scène une pièce de théâtre
Des élèves d’Ogano au Japon mettent en scène une pièce de théâtre traditionnel kabuki. Photo Hugo Duchaine, Journal de Montréal

« Des résidents choisissent de vivre à Ogano pour le théâtre et la culture kabuki », explique M. Koenuma. La ville compte une dizaine de scènes, du centre-ville au haut d’une colline, et organise jusqu’à 25 représentations par an. Les acteurs sont tous des amateurs vivant à Ogano, et ils y travaillent soit comme fonctionnaires ou dans la construction, par exemple.

Un sur dix

« C’est un habitant sur dix qui fait du théâtre, soit environ 500 personnes », proclame fièrement M. Koenuma.

Mais ici, les écoles ferment. Trois ont fusionné ces dernières années. Jusqu’à 1000 départs par an sont aussi enregistrés chez les jeunes adultes et les naissances, à peine 30 par an, ne peuvent pas compenser.

Des aînés appuient et guident les élèves Des aînés appuient et guident les élèves
Des aînés appuient et guident les élèves pour leur transmettre l’art kabuki. Photo Hugo Duchaine, Journal de Montréal

Pour maintenir ses activités et le tourisme qui en découlent, les jeunes sont initiés dès l’école primaire et secondaire au théâtre. L’objectif est de leur donner la piqûre, en espérant qu’ils restent à Ogano.

Asako Sekikawa Asako Sekikawa
Asako Sekikawa, âgée de 40 ans, revalorise les kimonos traditionnels en les louant aux intéressés à Chichibu. Photo Hugo Duchaine, Journal de Montréal

Moins de kimonos

Dans la ville voisine, à Chichibu, Hideo Terauchi a fondé un musée pour mettre en valeur les tissus de soie traditionnels uniques de sa région.

Le Chichibu-meisen est un art traditionnel reconnu au Japon. Les tissus de soie sont particulièrement colorés, ayant souvent des motifs floraux, ce qui les a rendus populaires chez les femmes au début du siècle dernier.

Il est lui-même la troisième génération à tisser la soie. Un métier de plus en plus rare, alors qu’il ne reste qu’une demi-douzaine d’artisans à Chichibu.

Hideo Terauchi Hideo Terauchi
Hideo Terauchi a fondé un musée à Chichibu pour mettre en valeur le tissage de la soie. Photo Hugo Duchaine, Journal de Montréal

« Ça disparaît », remarque-t-il, d’où l’importance d’un musée offrant des ateliers pour maintenir cet art en vie.

Mais au Japon, force est de constater que les kimonos n’ont plus la cote. Autant les femmes que les hommes sont peu nombreux à en porter.

Une deuxième vie

Asako Sekikawa a choisi d’en faire sa vocation à Chichibu. Elle ramasse les kimonos traînant dans les placards de familles japonaises pour les louer à ceux qui aimeraient en porter pour une occasion spéciale ou juste pour le plaisir.

« Les plus jeunes générations sont incapables de se vêtir elles-mêmes d’un kimono », se désole-t-elle, s’efforçant de garder cette tradition vivante.

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Québec
Le Québec atteindra les 25 % d’aînés (65 ans et plus) d’ici moins de 10 ans.
Un aîné nettoie un parc de Tokyo Un aîné nettoie un parc de Tokyo
Un aîné nettoie un parc de Tokyo. Ils sont nombreux à travailler comme concierge ou gardien de sécurité. Photo Hugo Duchaine, Journal de Montréal
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Une retraite presque disparue

De plus en plus d’aînés japonais continuent de travailler même après 65 ans pour subvenir à leurs besoins


Ils sont partout au Japon. Agents de sécurité, concierges dans les parcs, employés en cuisine ou derrière le comptoir d’un dépanneur, des aînés grisonnants, souvent le dos courbé, travaillent encore d’arrache-pied pour gagner leur vie.

Un peu plus de la moitié des personnes de 65 à 69 ans occupent toujours un emploi et c’est le tiers pour les 70 à 74 ans.

Avec une population âgée si grande, le régime des rentes japonais est sur la corde raide. Et pour les travailleurs qui n’ont pas obtenu un emploi stable pendant 40 ans dans une compagnie, la pension du gouvernement, qui tourne autour de 10 000 $ par an, est simplement insuffisante.

Le gouvernement a même doublé la contribution demandée aux aînés à faible revenus recevant des soins de santé, passant de 10 à 20 % des coûts. Même si le travail est extrêmement valorisé, il devient une nécessité chez plusieurs aînés.

C’est en partie pourquoi Fumio Murazeki a lancé l’agence de placement Koureisha, spécifiquement pour les aînés.

« Ça peut être très difficile de trouver du travail, il faut parfois convaincre les entreprises », explique-t-il. Son entreprise a trouvé un emploi à temps partiel à plus de 400 aînés, mais encore 500 se trouvent sur sa liste d’attente.

Le Journal a rencontré des Japonais, à Tokyo, à Osaka et à Nikko, travaillant toujours pour subvenir à leurs besoins ou pour aider leurs proches.

 
Naomi Asado Naomi Asado

À la retraite pour garder
son petit-fils

« J’arrive à survivre [financièrement] avec ma pension, mais parce que mon mari travaille encore », relate Naomi Asado, âgée de 69 ans. Retraitée du bureau de poste depuis quatre ans, cette résidente d’Osaka prend soin de son petit-fils Toa, tous les jours de la semaine pour aider son fils et sa belle-fille qui travaillent.

Photo Hugo Duchaine, Journal de Montréal
Mme Tateishi Mme Tateishi

« Ce n’est pas assez! »

Âgée de 72 ans, Mme Tateishi travaille encore cinq heures par jour, cinq jours par semaine comme concierge pour joindre les deux bouts. « Ce n’est pas assez! Tous mes amis le disent aussi et c’est de plus en plus dur », déplore-t-elle, à propos de l’aide financière du gouvernement. Cette fan de Céline Dion admet qu’elle travaille aussi pour garder la forme, mais, financièrement, elle ne peut pas ralentir la cadence.

Photo Hugo Duchaine, Journal de Montréal
Yuriko Suzuki Yuriko Suzuki

Tannée de travailler à 87 ans

« Je n’aime plus travailler, mais c’est ce qui me tient en vie », relativise Yuriko Suzuki. L’aînée de 87 ans vit à Nikko, dans les montagnes à environ 160 km de Tokyo. Malgré son âge vénérable, elle tient le coup presque sept heures par jour, parfois seule, dans un petit restaurant. Un emploi qu’elle occupe depuis déjà 20 ans.

Photo Hugo Duchaine, Journal de Montréal
Yoshinori Nakajima Yoshinori Nakajima

Devant l’orchestre à 83 ans

À 83 ans, Yoshinori Nakajima s’épanouit encore dans sa « deuxième vie ». Après une retraite forcée à 53 ans d’IBM, qui cherchait à réduire sa main-d’œuvre, il a réalisé son rêve en retournant aux études pour devenir chef d’orchestre. Même s’il a ralenti le rythme, il fait encore de quatre à cinq concerts par an au Japon. « C’est un gros défi physiquement », reconnaît le veuf, qui se dit privilégié d’avoir eu l’argent pour réaliser ce rêve.

Photo Hugo Duchaine, Journal de Montréal
Misako Suzuki Misako Suzuki

Encore une hypothèque à payer

Âgée de 74 ans, Misako Suzuki espère ne pas tomber malade pour garder son emploi à temps partiel dans un dépanneur. Son mari et elle travaillent toujours, car ils ont encore une hypothèque à payer pour leur maison à Nikko. Cette mère espérait y loger au moins un de ses quatre enfants, mais ils vivent tous à l’extérieur du petit village vieillissant. « Nous ne voulons pas laisser de dettes à nos enfants, alors nous devons rester en forme jusqu’à 90 ans », planifie-t-elle.

Photo Hugo Duchaine, Journal de Montréal
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Québec
Chez nous, l’Institut de la statistique du Québec (ISQ) chiffrait à 22 % les Québécois de 65 à 69 ans ayant toujours un emploi. Une tendance néanmoins à la hausse ces dernières années.
Un couple d’aînés Un couple d’aînés
Un couple d’aînés profitant d’un après-midi au parc à Osaka. Photo Hugo Duchaine, Journal de Montréal
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Comment le Japon prend soin de ses aînés

Gouvernements plus impliqués et hébergements hybrides, le pays multiplie les initiatives.


Traditionnellement, l’image du Japon est celle de familles multigénérationnelles sous un même toit, où les enfants prennent soin de leurs parents.

Mais le Japon, qui compte quand même près de 100 000 centenaires, doit aussi bâtir des centres de soins, comme les CHSLD, et s’assurer de leur offrir des services à domicile.

La solitude guette de nombreux aînés, c’est pourquoi des villes s’efforcent à jouer le rôle des proches ou que des entrepreneurs fondent des CHSLD plus humains.

La maison Happy Rokken La maison Happy Rokken
La maison Happy Rokken tapisse ses murs de photos. Photo Hugo Duchaine, Journal de Montréal

Un CHSLD pour aînés… et pour les gens du quartier

Un CHSLD, une garderie, un centre communautaire… La maison pour aînés Happy Rokken près d’Osaka, c’est un mélange de tout ça … et ça fonctionne très bien!

« Nous avons environ 200 personnes par semaine qui viennent nous voir », lance le fondateur Yoshihiro Shuto. Nul besoin de préciser que les 40 résidents aînés, qui vivent dans sa maison de soins ne manquent pas de visites.

Même au Japon, la maison Happy Rokken fait office d’exception. Si la tradition dans le pays a longtemps été pour les enfants de prendre soin de leurs parents, l’apparition et la multiplication des CHSLD au pays du Soleil-levant sont devenues inévitables en raison du nombre toujours plus élevé d’aînés.

Idée égoïste

Pour sa part, M. Shuto trouve rigolo que la création de son CHSLD hybride soit née par égoïsme, après une carrière dans l’immobilier.

« J’avais deux jeunes enfants dont je voulais davantage, ainsi que mes grands-parents », explique-t-il.

Happy Rokken est avant tout un centre de soins de six étages pour 40 aînés, avec des infirmières et des préposés aux bénéficiaires. Mais dans la journée, l’endroit est ouvert à tous.

Yoshihiro Shuto Yoshihiro Shuto
Yoshihiro Shuto a fondé ce CHSLD pour prendre soin de ses enfants et ses grands-parents au même endroit. Photo Hugo Duchaine, Journal de Montréal

Si un parent doit travailler de la maison avec un enfant, il peut choisir de faire du télé-travail ici une heure ou deux, où des résidents et le personnel garderont l’enfant avec plaisir.

Après l’école, des enfants du quartier viennent y passer quelques heures pour jouer.

Yoshihiro Shuto dit qu’il désire non seulement prendre soin des aînés, mais aussi de toute sa communauté. Selon lui, les personnes âgées deviennent « épuisées » si elles ne sont entourées que de gens du même âge toute la journée.

Rien de traditionnel

Ce qu’il propose est beaucoup plus près du milieu de vie, que se targuent souvent d’offrir les CHSLD traditionnels. Des résidents du quartier viennent aussi offrir toutes sortes d’ateliers sur les lieux.

Plutôt que d’insister sur un plan de traitement, il va plutôt demander au patient ce qu’il aimerait faire.

La maison Happy Rokken La maison Happy Rokken
La maison Happy Rokken offre tout les mêmes soins qu’un CHSLD, mais agit aussi comme un centre communautaire. Photo Hugo Duchaine, Journal de Montréal

Il donne l’exemple d’un homme âgé qui refusait de faire des exercices de réadaptation. M. Shuto a alors invité des musiciens pour des soirées dansantes, lui rappelant sa jeunesse et l’aidant à travailler sa motricité.

Malgré les aspects inusités de sa maison de soins, il explique n’avoir eu aucune difficulté bureaucratique pour la rendre opérationnelle.

Le décor est également saisissant. Au rez-de-chaussée, d’innombrables photos tapissent les murs, rappelant les activités des derniers mois.

Aucun étage n’est décoré de la même façon. Au quatrième, une tapisserie au thème de la jungle détonne avec l’image traditionnelle des CHSLD.

La ville d’Hadano La ville d’Hadano
La ville d’Hadano, au pied des montagnes, est très vieillissante. Une personne sur trois est un aîné. Photo Hugo Duchaine, Journal de Montréal

Quand la Ville
devient un proche

Au pied des montagnes, la petite ville d’Hadano doit désormais jouer le rôle d’un membre de la famille pour ses résidents aînés, qui forment plus du tiers de sa population.

« Nous débordons de travail, souffle Nahoko Sugiyama, inspectrice en chef pour le département d’aide aux aînés. Nous avons dû augmenter les budgets à la Ville pour leur venir en aide. »

À environ une heure de train de Tokyo, il s’agit d’une banlieue particulièrement vieillissante. Sur près de 160 000 habitants, 31 % ont 65 ans et plus. Et de nombreux aînés vivent seuls, leurs enfants ayant pris la direction de la métropole.

Contrairement au Québec, cette municipalité joue un rôle de proximité auprès des aînés. Mais même au Japon, Mme Sugiyama admet que ce ne sont pas toutes les villes qui en font autant.

C’est énormément de travail pour le petit département de 40 employés, qui ne sont pas tous à temps plein. Mais pour Nahoko Sugiyama, sa municipalité n’a pas d’autre choix que de jouer le rôle d’un proche pour les aînés qui en sont privés.

Avec les années, l’aide de la municipalité s’est diversifiée et les services sont nombreux.

Aide au transport

Comme le transport, dont s’occupent des bénévoles, pour aider les aînés dans leurs commissions. Avec le vieillissement, l’économie ralentit et les commerces de proximité ferment et les montagnes rendent les marches plus ardues.

L’initiative coûte 42 000 yens par an (environ 425 $) à la Ville, avec l’aide d’autres organismes et des entreprises privées. Une fois par semaine, sept bénévoles dans des véhicules de huit places accompagnent des aînés dans leurs commissions.

En retour, ils se sentent moins seuls et ils achètent ce dont ils ont besoin.

Michiko Sato et Nahoko Sugiyama Michiko Sato et Nahoko Sugiyama
Michiko Sato et Nahoko Sugiyama gèrent le département municipal d’aide aux aînés à Hadano. Photo Hugo Duchaine, Journal de Montréal

Mme Sugiyama ajoute que beaucoup d’aînés se présentent à l’Hôtel-de-Ville avec des difficultés financières. C’est pourquoi des subventions ont été mises en place pour différents produits, comme les couches, ou pour l’aide à domicile.

Pompiers et avocats

Les gens seuls peuvent aussi s’enregistrer auprès la municipalité, qui assure alors un suivi auprès d’eux avec l’aide des pompiers.

La fonctionnaire souligne que la Ville recevait des appels de voisins, parce qu’ils entendaient des cris d’une personne souffrant soit de détresse, soit de démence, ou parce qu’ils étaient sans nouvelles depuis plusieurs jours.

Enfin, même le département légal d’Hadano est mis à contribution pour les aînés, offrant de gérer leur budget de ceux qui n’ont plus les capacités de le faire.

Dans un parc de Tokyo, ces travailleurs mangent seuls Dans un parc de Tokyo, ces travailleurs mangent seuls
Un ministère lutte désormais contre la solitude au Japon. Dans un parc de Tokyo, ces travailleurs mangent seuls. Photo Hugo Duchaine, Journal de Montréal

Même un ministère lutte
contre la solitude

Santé, Économie, Éducation… et maintenant Solitude. Le gouvernement japonais a pris les grands moyens en créant un ministère pour combattre ce fléau et les problèmes de santé mentale qui y sont associés.

C’est à la suite d’une hausse marquée et alarmante des suicides qu’un tel poste a été annoncé en 2021.

La solitude est particulièrement marquée chez les adultes de 20 à 60 ans au Japon, et surtout chez les hommes. Cependant, elle touche tous les groupes d’âge, notamment les aînés.

Morts de solitude

« Nous voyons beaucoup de ce qu’on appelle des ‘’morts de solitude’’ chez les aînés », précise le haut-fonctionnaire Satoshi Tada, au ministère de la Solitude à Tokyo.

Masanobu Ogura
Masanobu Ogura est le nouveau ministre devant lutter contre la solitude. Photo Hugo Duchaine, Journal de Montréal

Il s’agit de personnes âgées qu’on retrouve seules plusieurs jours après leur décès. Que la mort soit naturelle ou un suicide, ces aînés sans proches sont découverts quand les voisins se plaignent d’une mauvaise odeur, poursuit-il.

Ils sont très malades ou ils ont des problèmes financiers et, s’ils ont des proches, ils ne veulent pas devenir un « poids » pour eux, poursuit M. Tada. Le gouvernement n’a toutefois pas chiffré l’ampleur du phénomène.

Pire que la COVID-19

Au Japon, le suicide est une pandémie encore plus meurtrière que la COVID-19, selon ce qu’ont rapporté les médias nationaux, alors qu’il aurait été responsable de plus de décès en 2020.

Toutefois, la pandémie a exacerbé les problèmes de solitude des Japonais, notamment chez les aînés.

Le problème est tel que dans ce pays, où le travail a longtemps été valorisé, le gouvernement fait désormais la promotion pour des congés.

Les gens devraient travailler moins, fait remarquer M. Tada, ajoutant aussi qu’il est important d’élargir son cercle d’amis.

Il souligne aussi qu’au Japon, la norme, habituellement, c’est que les travailleurs gardent le même emploi toute leur vie, mais cela limite ainsi leur réseau social.

De plus, les jeunes sont moins portés à se marier qu’avant, alors qu’ils associent le mariage à des coûts pour l’achat d’une maison et à l’arrivée d’enfants.

20%

Québec
Le dernier de sondage de l’Institut national de santé publique du Québec (INSPQ) révélait en novembre 2022 qu’environ 11 % des répondants se sentaient seuls.
Des femmes japonaises Des femmes japonaises
Des femmes japonaises portent le kimono à Osaka. Photo Hugo Duchaine, Journal de Montréal
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La technologie
à la rescousse

Pousser l'innovation au plus vite pour aider les aînés avant qu'il ne soit trop tard.


Les inventeurs japonais sont dans une course contre la montre pour trouver des façons de soigner les aînés malades de plus en plus nombreux, alors qu’il y a de moins en moins de main-d’œuvre.

« Le temps presse » reconnaît Saori Haga, directrice de la recherche et du développement au Future Care Lab de Tokyo. Un laboratoire dédié à l’innovation et à la création de nouvelles technologies dans les soins aux aînés. Il a été fondé par l’entreprise Sompo, géant des assurances, mais aussi propriétaire de l’équivalent nippon des CHSLD.

Mais ici, pas de robots tape-à-l’œil qui circulent ou clignotent, promettant de remplacer dans un avenir rapproché les infirmières ou préposés aux bénéficiaires. Selon Mme Haga, l’objectif est avant tout de simplifier la tâche des employés œuvrant au chevet d’aînés… et de combler la pénurie de main-d’œuvre.

 

Saori Haga Saori Haga
Saori Haga, directrice de la recherche et du développement au Future Care Lab de Tokyo, montre comment ce matelas suit le rythme du sommeil. Photo Hugo Duchaine, Journal de Montréal

Déjà, des études gouvernementales estiment qu’il manque plus de 100 000 travailleurs auprès des Japonais malades. D’ici 10 ans, le manque à combler est évalué à près de 700 000 employés dans ce secteur.

Au Québec, par exemple, le gouvernement cherche à embaucher 120 000 personnes d’ici cinq ans dans le réseau de la santé, dont 55 000 préposés aux bénéficiaires.

Pratico-pratiques

Les innovations doivent d’abord être concrètes et pratico-pratiques, soutient la directrice du laboratoire. Pour soutenir un employé pour lui permettre d’effectuer seul une tâche qui prendrait deux à trois personnes, par exemple.

Le Future Care Lab s’affaire ainsi à mettre sur pied des applications, comme :

  • un code QR pour vérifier qu’un résident obtient les médicaments qui lui sont destinés et réduire ces erreurs fréquentes.
  • un plancher camouflant près de trois centimètres de caoutchouc pour amortir les chutes en douceur.
  • un matelas qui suit le rythme du sommeil d’un résident, pouvant alerter un employé si quelqu’un se réveille, mais aussi offrir des détails clés sur la santé de la personne.
Un plancher, copiant le bois, mais avec près de 3 cm de caoutchouc Un plancher, copiant le bois, mais avec près de 3 cm de caoutchouc
Un plancher, copiant le bois, mais avec près de 3 cm de caoutchouc. Photo Hugo Duchaine, Journal de Montréal

« Si le résident dort mal et se réveille fréquemment, ça peut camoufler un problème de santé ou un besoin de changer sa médication », explique Mme Haga.

Douche spatiale

La création la plus surprenante du Future Care Lab jusqu’à présent ressemble à un petit vaisseau spatial, aux couleurs pastel, lequel est en réalité une douche.

Le prototype d’une douche Le prototype d’une douche
Le prototype d’une douche ressemblant à un vaisseau spatial aux couleurs pastel. Photo Hugo Duchaine, Journal de Montréal

Pour éliminer les risques qu’il y ait des chutes dans les douches traditionnelles ou pour que donner un bain soit moins complexe, le résident est couché dans une chaise et glissé dans le vaisseau-douche. L’employé peut ensuite le nettoyer grâce à un pommeau de douche.

Pour Saori Haga, la technologie ne doit pas remplacer le contact humain. Des employés seront toujours nécessaires pour aider à faire manger ou faire la toilette. L’idée est plutôt de simplifier et d’alléger les tâches périphériques, souligne-t-elle.

L’entreprise japonaise Silverwood L’entreprise japonaise Silverwood
L’entreprise japonaise Silverwood utilise la réalité virtuelle pour mettre ses soignants dans la peau d’une personne atteinte de démence. Photo fournie par Silverwood

La réalité virtuelle pour comprendre la démence

Le vieillissement de la population japonaise rend la démence extrêmement fréquente chez les aînés, poussant une entreprise à se tourner vers la réalité virtuelle pour aider ses employés.

« Le manque de compréhension [des patients souffrant de démence], ça empire les symptômes et aggrave les conditions dans lesquelles il faut donner des soins », explique Ayako Ono, qui travaille chez Silverwood, une entreprise de maison pour aînés.

Un sur cinq

La démence touche environ un aîné sur cinq au Japon et presque une personne de 85 ans et plus sur deux, dit-elle. Mais Silverwood a remarqué qu’elle restait souvent incomprise chez ses employés, impuissants devant un malade qui devenait fâché ou agressif, ne sachant plus quoi dire ou quoi faire.

L’idée leur est venue d’utiliser la réalité virtuelle pour plonger les travailleurs dans la peau d’une personne atteinte de démence. Plus de 90 000 personnes partout au Japon, et au-delà des murs de la compagnie, ont suivi la formation.

L’entreprise japonaise Silverwood L’entreprise japonaise Silverwood
Déjà plus de 90 000 personnes ont suivi la formation. Photo fournie par Silverwood

Mme Ono soutient que les symptômes de la démence sont nombreux et désorientants. Ils ne se limitent pas non plus aux trous de mémoire.

Par exemple, elle relate l’histoire vécue d’une patiente qui refusait de sortir d’un véhicule, car elle avait l’impression qu’on cherchait à la lancer en bas d’un édifice de trois étages. « La maladie troublait sa perception des distances », indique-t-elle, ajoutant que la peur et la colère qu’éprouvait cette aînée deviennent beaucoup plus compréhensibles pour ses aidants.

L’entreprise Silverwood espère étendre ses expériences en réalité virtuelle en dehors des frontières du Japon, sachant que le vieillissement de la population guette de nombreux pays.

Eduardo Lugo Eduardo Lugo
Eduardo Lugo de Sage-Sentinel montre le prototype du bracelet et des caméras infrarouges suivant les mouvements. Photo Hugo Duchaine, Journal de Montréal

Un bracelet contre
les chutes

Des chercheurs québécois développent actuellement au Japon une technologie pour détecter et prévenir les chutes chez les aînés.

L’idée d’un tel projet est née chez le professeur Jocelyn Faubert de l’Université de Montréal, qui cherchait à protéger sa mère de chutes à répétition. Chez les aînés, les chutes ont souvent de graves répercussions, pouvant même mener à leur décès.

Ce dernier et Khashayar Misaghian ont cofondé le projet Sage-Sentinel, qui a reçu du financement de l’Institut des sciences et technologies d’Okinawa. Ils développent un bracelet afin de prévenir les chutes, qu’ils espèrent pouvoir commercialiser au Japon d’ici deux ans.

Là-bas, les chutes sont responsables des blessures physiques dans plus de la moitié des cas chez les 65 à 79 ans, et c’est près de 80 % chez les 80 ans et plus.

Cinq secondes d’avance

« Nous voulons prédire les chutes de trois à cinq secondes avant qu’elles surviennent », explique M. Misaghian.

Porté par l’aîné, le bracelet est relié à des capteurs dans une pièce qui suivent les mouvements du corps, tel un scanneur. Comme un système de surveillance, mais sans caméras de surveillance invasives.

Jocelyn Faubert Jocelyn Faubert
Jocelyn Faubert a eu l’idée de chercher une technologie pour prévenir les chutes, afin d’aider sa mère. PHOTO TIRÉE DU SITE DE SAGE-SENTINEL

« Le corps a une cadence quand il bouge et, si l’on devient instable, le rythme est différent. L’objectif est de déceler ces indices d’un déséquilibre », poursuit M. Faubert, qui étudie les effets du vieillissement depuis 20 ans.

Il ajoute que les chutes sont rarement dues à une collision ou un accident imprévu chez les aînés. Et en lançant un signal d’alerte juste quelques secondes avant la chute, cela peut permettre à un aîné de prendre une pause ou d’agripper quelque chose de solide.

Des milliards d’économies

Selon Khashayar Misaghian, les premiers tests révèlent que leur technologie, gardée secrète pour l’instant, serait assez précise dans 87 % des chutes.

« Mais déjà, si l’on prévient seulement 30 % des chutes, nous avons calculé que ce serait des économies de six milliards de yens (environ 60 millions $) pour le système de santé », dit-il.

87,5

Québec
Au Québec, l’espérance de vie en 2021 était de 84,9 ans pour les femmes et 81,1 ans pour les hommes. C’est l’une des plus élevées au monde, mais un peu moins qu’au Japon.
Un aîné japonais attend Un aîné japonais attend
Un aîné japonais attend pour traverser le célèbre carrefour du quartier Shibuya à Tokyo. Photo Hugo Duchaine, Journal de Montréal
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L’immigration cachée qui augmente

Le mot est caché, voire même tabou, mais l’immigration augmente sans cesse au Japon.


Le vieillissement de la population accentue la pénurie de main-d’œuvre, forçant le pays à ouvrir ses frontières aux étrangers.

« Le gouvernement ne parle jamais d’immigrants ou d’immigration, il fait plutôt valoir qu’il s’agit de politiques pour combler le manque de main-d’œuvre et accueillir des travailleurs étrangers », explique la professeure de sociologie à l’Université de Tokyo, Sachi Takaya.

Sachi Takaya Sachi Takaya
Sachi Takaya est professeure de sociologie à l’Université de Tokyo. Photo Hugo Duchaine, Journal de Montréal

Si le mot est caché, c’est avant tout pour éviter la furie et l’obstruction des membres d’extrême-droite au sein des élus conservateurs, poursuit-elle.

Par contre, l’immigration est bien réelle. De 2012 à 2019, la part de nouveaux arrivants est passée de 900 000 à près de 3 millions selon des données gouvernementales. Et c’est loin d’être fini : le pays aura besoin de près de sept millions de travailleurs étrangers d’ici 2040 pour soutenir son économie en raison de la crise démographique, toujours selon une agence gouvernementale.

Le quartier d’Ikuno à Osaka Le quartier d’Ikuno à Osaka
Le quartier d’Ikuno à Osaka, surnommé Korea Town, est l’endroit où l’immigration est la plus visible au Japon. Photo Hugo Duchaine, Journal de Montréal

Quartier du futur

Ces changements démographiques sont particulièrement évident dans le quartier d’Ikuno à Osaka, la troisième plus grande ville du Japon. Un résident sur cinq est d’origine étrangère.

Surtout des Coréens, mais aussi des personnes provenant du Vietnam, des Philippines ou du Népal. En tout, 60 pays sont représentés dans le quartier historiquement connu sous le nom de « Koreatown ».

Pour le maire du quartier, Akihiro Sujihara, le quartier d’Ikuno est à l’image du Japon du futur.

« C’est évident que le vieillissement de la population pose un défi énorme et nous ne pourrons pas survivre [économiquement] sans l’arrivée d’étrangers », souligne-t-il.

Akihiro Sujihara Akihiro Sujihara
Akihiro Sujihara est maire d’Ikuno. Photo Hugo Duchaine, Journal de Montréal

Pourtant, le Japon n’est pas reconnu pour être un pays aux frontières poreuses. Même pour les millions de nouveaux arrivants, que l’on désire voir travailler dans les usines, dans l’industrie alimentaire ou des soins, la citoyenneté reste hors de portée. Ils ne peuvent qu’obtenir des visas que pour certains emplois en demande, laissant présager qu’ils devront repartir d’ici quelques années.

En retard

« Ça fait 20 ans qu’on en parle et le gouvernement commence tout juste à agir », renchérit Oh Song.

Le Japonais d’origine coréenne a fondé un organisme pour aider les enfants d’immigrés à s’intégrer dans la société japonaise, en leur offrant notamment des cours de langue.

Oh Song Oh Song
Oh Song, un Japonais d’origine coréenne, a fondé un organisme pour aider les enfants d’immigrants à s’intégrer dans la société japonaise, en leur offrant notamment des cours de langue. Photo Hugo Duchaine, Journal de Montréal

L’anglais est encore bien peu parlé au Japon et il s’agit du principal obstacle pour les immigrants.

Et malgré la nécessité d’avoir des travailleurs étrangers, leurs conditions restent précaires. Le logement peut être difficile à trouver par exemple, d’où l’attrait d’un quartier comme Ikuno, historiquement peuplé d’étrangers.

Le maire Sujihara s’efforce quant à lui d’attirer des entreprises et de mousser la création de PME locales pour améliorer les conditions de vie des nouveaux arrivants.

L’Hôtel-de-Ville du quartier Ikuno L’Hôtel-de-Ville du quartier Ikuno
L’Hôtel-de-Ville du quartier Ikuno est l’un des rares endroits à offrir des services dans plusieurs langues, pas seulement le japonais. Photo Hugo Duchaine, Journal de Montréal

La menace nord-coréenne
amplifie le racisme

Les Coréens vivant au Japon se sentent doublement menacés par les tirs de missiles de la Corée du Nord, amplifiant le racisme dont ils sont victimes sur leur terre d’accueil.

« Chaque fois qu’un missile est lancé, ça fait ressortir les préjugés », remarque avec regret Jin Woong Kwak, qui a fondé un organisme sans but lucratif à Osaka pour défendre la minorité coréenne au Japon.

Ces derniers mois, la Corée du Nord a fait de nombreux tirs d’essais de missiles dans la mer du Japon, qui sépare les deux pays. La cadence s’est même accélérée cet automne et l’un des missiles s’est rendu au large de l’île d’Hokkaido, dans une zone économique japonaise, sans faire de dommages.

La diaspora coréenne au Japon compte environ un million de personnes et même si un très grand nombre vivent sur cette île depuis deux ou trois générations, ils n’ont ni la citoyenneté ni le droit de vote.

Jin Woong Kwak Jin Woong Kwak
Jin Woong Kwak a fondé un organisme sans but lucratif à Osaka pour défendre la minorité coréenne au Japon. Photo Hugo Duchaine, Journal de Montréal

M. Kwak souligne que cet automne, une université japonaise de langue coréenne a dû fermer ses portes plus tôt à la suite de menaces. D'autres écoles ont été ciblées pour des appels ou des graffitis haineux.

« Ça dit ‘’Cessez de faire ça [les tirs de missile] et rentrez chez vous‘’ », relate-t-il.

D’origine coréenne, mais né à Osaka, Oh Song a toujours vécu au Japon. Le sexagénaire dit être devenu un activiste, en raison de la difficulté à être accepté dans la société japonaise.

À l’université, il cachait son identité coréenne, ajoutant qu’il n’est pas rare de voir des Coréens vivant au Japon changer leur nom. Il était aussi presque impossible de se faire embaucher dans les grandes compagnies ou comme fonctionnaire, c’est pourquoi énormément de Coréens ont dû se lancer en affaires, poursuit-il.

Avec la Corée du Nord qui mène des tirs de missiles sans explication, tout près du Japon, Jin Woong Kwak voit une double menace peser sur les Coréens vivant au Japon : celle d’un missile s’écrasant ici, mais surtout, celle de la haine qu’il laisse dans son sillage.

 

Ce reportage a été réalisé grâce à la Bourse de reportage international de l'Agence QMI


CRÉDITS

Journaliste : Hugo Duchaine

Design et réalisation : David Lambert

Intégration web : Cécilia Defer

Direction création contenus : Charles Trahan

 
Sommaire  
1Des traditions en péril par manque de relève 1Une retraite presque disparue 1Comment le Japon prend soin de ses aînés 1La technologie à la rescousse 1L'immigration cachée qui augmente